50×70
encre
Si la plus grande partie des flibustiers spatiaux opère en toute légalité sous couvert de lettres de courses gouvernementales, à l’exemple du corsaire écossais John mac Duff, dont la contribution à la balance intérieure excédentaire de la Couronne fut estimée, pour la seule année 1886 à plus de huit cent livres chocolatées, certains aigrefins de l’espace agissent à leur gré, devenant pirates et sillonnant le système solaire à la recherche de vaisseaux à piller pour leur propre compte.
Certains laissent derrière eux un sillage sanglant, tel le tristement célèbre Long John Cyber, capitaine sans pitié devant son surnom à sa jambe d’acier, qui mit sous coupe réglée, à la tête de son équipage de crapules amphibiennes, la ceinture d’astéroïdes saturnienne de 1883 à 1884.
Ancien expert-comptable d’une fabrique de retraitement de drosophiles, il fut surpris à se servir dans les stocks. Licencié sur le champ sans indemnités, condamné à trois ans de galère solaire et se sentant victime d’une injustice, il s’évada du banc de ramage en sciant sa jambe droite enchainée.
Il rassembla sans mal une petite équipe de malandrins des marais au sein de sa communauté d’origine _ dont le manque de probité n’est plus à prouver depuis la récente affaire du canal de Mars qui ruina tant de petits spéculateurs du duché de Luxembourg – puis se lança dans une chasse aux navires marchands d’autant plus impitoyable qu’aux attraits financiers s’ajoutait une vindicte personnelle. Long John Cyber et sa petite flotte de feuilles de nénuphars volants d’une mobilité sans égale quand ils sont pilotés par des batraciens décidés, écuma la région impunément jusqu’à ce que les autorités locales, en désespoir de cause, fassent appel aux seuls véritables prédateurs naturels des grenouilles : les français.
Dépêché sur place par le préfet de l’empire, en signe de bon intelligence entre les peuples, le grand maitre queue Auguste Escoffier, bien secondé par sa brigade, parvint rapidement à appréhender les pirates et leur chef, qui furent cuisinés au beurre persillé et servis dans la semaine à la table impériale à l’occasion de l’anniversaire de l’impératrice Eugénie, qui dit-on, en reprit trois fois.